Mi-février, le gouverneur de la Banque nationale de Belgique (BNB) en poste, Luc Coene, s’était exprimé sur la santé financière des banques au travers de son dernier rapport annuel. Dans le texte de la BNB, il plaidait pour « une tarification plus systématique des services offerts afin de rendre ceux-ci plus conformes au coût réel des activités ». Des propos qui ont fait bondir bien des observateurs, considérant qu’il n’entre pas dans les tâches d’un gouverneur de la Banque nationale de donner ce type de conseil.
Pour Jean-Philippe Ducart, de Test-Achats «la Banque nationale n’a pas à se substituer aux acteurs ou aux politiques. Par ailleurs, on ne résout pas un problème structurel comme celui de la rentabilité par une réponse conjoncturelle». Le porte-parole de l’organisation des consommateurs rappelle aussi au passage la possibilité facilitée depuis 2009 de mobilité interbancaire qui permet de changer de banque de manière rapide et gratuite et pour lequel 60.818 demandes ont été introduites en 2014.
Le PS a également réagi en dénonçant une telle attitude dans le chef de Luc Coene : «Quand la Banque nationale ne s’occupe pas de vouloir supprimer l’index et de diminuer le pouvoir d’achat des Belges, elle donne de bonnes idées aux banques… pour une fois de plus faire trinquer le consommateur.» Idem pour le professeur Paul de Grauwe, professeur à la London School of Economics et professeur émérite à la KUL, qui estime que «ce n’est pas la tâche de la Banque nationale d’organiser le cartel des banques et de servir leur profitabilité».
Du côté de Febelfin, on considère que chaque institution définit elle-même sa politique bancaire et aucune recommandation n’est formulée concernant des hausses de tarifs. Dans un document de Febelfin daté de mars 2014 «Rechercher ensemble une croissance économique durable», on s’accorde d’ailleurs à dire qu’une augmentation des tarifs des services bancaires pourrait freiner le développement économique de notre pays. Les députés socialistes envisagent pour leur part le dépôt d’une résolution afin d’interdire toute augmentation tarifaire pour le consommateur et d’obtenir une analyse de l’observation des prix sur l’évolution des tarifs bancaires.
Nouvelle équipe
Le 10 mars dernier, l’ex-chef de cabinet de Guy Verhofstadt est parti à la retraite et a été remplacé par Jan Smets (CD&V). Autre gouverneur, autre style : le nouveau patron de la BNB a été pour sa part chef de cabinet de Wilfried Martens et de Jean-Luc Dehaene. Jan Smets se dit «centriste». Ayant fait une grande partie de sa carrière au sein du service d’études de la BNB, ses compétences économiques et financières sont reconnues de tous. Sans nul doute sera-t-il plus discret, à la recherche de consensus, teintés d’accents plus sociaux. Lors d’une interview accordée à la RTBF du 11 mars dernier, Jan Smets ne s’est pas montré aussi velléitaire que son prédecesseur à propos de l’indexation de salaires, parlant de correction du dispositif en cas de chocs extérieurs (par exemple de hausse du prix du pétrole) et préconisant davantage un tax shift vers la TVA, les accises, l’impôt sur l’environnement et certaines valeurs et revenus du patrimoine.
Avec le départ de Luc Coene et l’arrivée de Jan Smets décidée par l’ancien gouvernement, c’est un jeu de chaises musicales qui a eu lieu boulevard de Berlaymont. À la grande fureur du Boulevard de l’Empereur, Pierre Wunsch (MR) est devenu vice-gouverneur, remplaçant Mathias Dewatripont (PS), redevenant directeur, alors qu’il avait remplacé Françoise Masai l’an dernier. Autre directeur PS : Vincent Magnée. Mais aussi Jean Hilgers (CDH), Marcia De Wachter (CD&V) et Tom Dechaene (N-VA) remplaçant Norbert de Batselier (étiqueté SP.A).
En termes de modération salariale, la BNB montrera-t-elle l’exemple? Le gouverneur de la BNB se verra attribuer un salaire annuel de 478.000 euros, au lieu de 545.000. Une réduction de 12% qui s’applique à l’ensemble du comité de direction de la BNB.
N. Cobbaut