Coups de tonnerre et, apparemment, revirement de jurisprudence : créance et dette du fisc peuvent être compensées durant un règlement collectif de dettes, même si elles ne sont pas toutes deux nées avant l’admissibilité!
À l’inverse de ce qu’avait décidé la jurisprudence des juridictions de fond jusqu’à présent, la Cour de cassation juge que l’article 334 de la loi-programme du 27 décembre 2004 (modifiée par la loi-programme du 22 décembre 2008) autorise le fisc à opérer une compensation entre la créance dont il dispose à l’égard d’un requérant en règlement collectif de dettes et qui est née avant la naissance du concours, soit avant que la décision d’admissibilité ne produise ses effets, et un crédit d’impôt dont bénéficie ce requérant et qui est né après ce moment.
En l’espèce, il s’agissait, d’une part, d’une avance consentie par le Service des créances alimentaires pour des aliments dus par le requérant, que le SPF Finances récupérait à charge de celui-ci et qui avait fait l’objet d’une déclaration dans le cadre de la procédure de règlement collectif, et, d’autre part, d’un crédit d’impôt lié aux activités professionnelles du requérant, activités postérieures à l’admissibilité.
Les juges du fond avaient considéré jusqu’ici que la loi-programme du 27 décembre 2004 avait créé une forme de compensation propre au droit fiscal en n’exigeant pas, contrairement au droit commun, qu’il existe un lien étroit de connexité entre la créance et la dette à compenser lorsque cette compensation intervenait après la naissance d’un concours entre les créanciers.
En effet, cette créance et cette dette pouvaient concerner des impôts de nature différente (impôt des personnes physiques et taxe sur la valeur ajoutée par exemple). Il en était d’autant plus ainsi depuis que la loi-programme du 22 décembre 2008 (entrée en vigueur le 1er janvier 2009) permettait cette compensation à propos de créances non fiscales dont la perception et le recouvrement ont été confiés au SPF Finances, telles que les créances alimentaires.
Mais les juges du fond estimaient que, à l’instar de ce que la Cour suprême semblait avoir décidé en matière de faillite (Cass. [1re ch.], 24 janvier 2010, n°F.09.0085.N), la loi-programme en question ne dérogeait pas au droit commun en ce que la créance et la dette à compenser, même de nature différente, devaient toutes deux être nées avant l’admissibilité. La Cour de cassation vient de leur donner tort!
Télécharger le PDF Cass. (3e ch.), 31 mars 2014, n°S.12.0078.F.